C'est le conseil donné par Johan Sanctorum à ses lecteurs sur Doorbraak pour l'an nouveau. Quittez les sentiers battus, soit vous vous émerveillerez, soit vous serez fourbu, et alors ? Des Flamands ont fêté la Noël non la veille du jour de la naissance de l'enfant Jésus, comme de coutume, mais le jour même, pour la simple raison que ce jour-là les sapins et tout le toutim sont disponibles à moitié prix, et de même pour les dindes et les airelles. Cela crée, prétend-il, une atmosphère de conspiration entre ceux qui refusent de faire comme la majorité et d'en adopter le comportement grégaire.
Pensez, dit-il, au plaisir de rouler à votre allure sur une route déserte alors que la masse se trouve coincée sur l'autoroute dans un embouteillage de plusieurs dizaines de kilomètres, avec des maris qui jurent, des épouses qui soupirent et des enfants qui geignent sur la banquette arrière.
Le mondialisme de la consommation à l'échelle planétaire, auquel un milliard et demi de Chinois se sont adjoints, détruit les villes et paysages, estime-t-il, dans la stérilité la plus complète. Barcelone, Venise et Bruges « et ses cinq cents chocolatiers » sont toutes victimes de leur réputation de « bien commun collectif », plein de Britanniques ivres qui écoutent leur musique à tout va, quand ils ne déversent pas leur trop-plein sans la moindre gêne, et c'est ne pas parler de l'Everest et de toute la chaîne de l’Himalaya que des barbares parsèment de canettes et de détritus.
Cela fait malheureusement parfois des victimes. Les foules attirent des fous, des esprits malades aux intentions malveillantes qui foncent avec leur véhicule sur un marché de Noël, par exemple, ou des inconscients qui finissent étouffés ou écrasés comme ce fut le cas en Corée en 2022 lors du festival d'Halloween ou en Inde lorsqu'un pont surchargé sur lequel dansaient des gens s'effondra et fit 80 victimes.
En cause, avance-t-il, l'hyper-communication via les réseaux sociaux ainsi que la culture moderne du battage médiatique et des tendances dont à un moment donné seuls les nerds et les asociaux se détournent. Tout le reste s'y met. La psychologie des masses entre alors en jeu. Tout bouge comme une vague qui enfle, charrie d'innombrables particules et confère aux gens le sentiment euphorique que le groupe les assimile et les protège.
Anthropologues et psychologues s'accordent, selon Sanctorum, sur le fait qu'un rassemblement ne devrait pas dépasser le nombre de deux cents personnes. Au-delà, le groupe ne se comporte plus comme tel mais comme un troupeau, et les fêtes deviennent des « événements » à grande échelle et dans l'anonymat. Il suffit alors d'un faux pas pour déclencher une catastrophe. Les lieux de qualité sont des lieux cachés. Dès qu'ils sont vantés auprès du grand public, ils perdent de leur qualité.
Soyez malin, ne suivez pas le tout-venant. Choisissez la voie la moins encombrée. Le philosophe allemand Martin Heidegger, rappelle Sanctorum, en parle comme des « Holzwege », ces « chemins qui ne mènent nulle part ». Et, conclut-il, quand ils seront tous éventés, il restera toujours ce lieu où le sapin de Noël au rabais perd vite quelques aiguilles, mais qui nous est si cher : le chez soi.