« My fellow Americans, this is Liberation Day. April 2, 2025 will forever be remembered as the day American industry was reborn, the day America’s destiny was reclaimed, and the day that we began to Make America Wealthy Again. » - President Donald J. Trump. La question que se pose cet article est : A quand le Jour de Libération de l'Europe ?
« Être un ennemi des Etats-Unis est dangereux, mais être leur ami est fatal », aurait déclaré le bon Dr Henry Kissinger. Il aurait aussi dit : « L’Amérique n’a pas d’amis ou d’ennemis permanents, elle n’a que des intérêts. » « L’Europe » eût été avisée de se le tenir pour dit, bien que le président des Etats-Unis se soit partiellement ravisé quant à l’application de ses droits d’entrée « réciproques » sur les produits que son pays importe du reste du monde, tout en menaçant d’autres mesures de rétorsion. Rien ne sera respecté, nous dit-on, ni les engagements politiques ou commerciaux, ni le dollar, ni la dette publique.
Que l’on y voie ou non une tentation nihiliste face à l’émergence d’un nouveau monde multipolaire, qu’importe. L’Europe est à un tournant. Il lui faut choisir entre le repli, l’alignement sur les grandes puissances ou l’affirmation d’un rôle stratégique indépendant sur la scène internationale. Les grands sachants, qui ont démontré qu’ils n’étaient ni l’un ni l’autre, ne manqueront pas de répéter leurs poncifs en matière d'intégration européenne, de politique industrielle, de boussole pour une défense commune, de promotion du « modèle » européen de gouvernance, de droits de l’homme et de développement durable - à coup de milliers de milliards d’euros que l’Europe n’a pas. Il est douteux que cela fasse la moindre différence avec ce que l’on a connu depuis le début du XXIe siècle, si ce n’est au niveau de l’endettement.
« Höchste Zeit für Selbstkritik » titrait Die Zeit, le grand hebdomadaire allemand d’information et d’analyse politique, le 3 avril 2025. Que les dirigeants européens se montrent à ce point sensibles aux critiques aussi acerbes soient-elles de J.D. Vance en cache un aspect indubitable, signale l’auteur de l’article : elles comportent une part de vérité. Il est grand temps que nos dirigeants procèdent à leur autocritique. Que la présidente de la Commission Mme von der Leyen ait proclamé que l’heure de l’Europe était venue et qu'elle ne pouvait se permettre d’être ballottée d’un côté à l’autre de l’Histoire ne peut pas entièrement nous rassurer. Ce ne serait pas la première fois que la fierté de soi se transforme en contentement de soi, surtout quand il s'agit pour l’Europe de mettre en avant sa prétendue supériorité morale.
L’article dans Die Zeit fait référence au politologue Herfried Münkler qui dans Welt in Aufruhr paru en 2023 esquisse un monde façonné par une pentarchie dont à ses yeux feront nécessairement partie les Etats-Unis, la Chine et l’Inde mais où il reste à voir si l’Europe et la Russie trouveront place. Si elle veut avoir son mot à dire, l’Europe doit devenir meilleure et, à cette fin, cultiver l’autocritique. C’est un aspect, poursuit l'auteur de l’article, avec lequel l’Europe éprouve de grandes difficultés. Cela tient à sa posture universaliste, « post-nationale », et à sa prétention d'excellence normative.
L’Amérique innove, la Chine imite, l’Europe légifère, dit-on. L’intelligence artificielle en fournit un exemple. « Je salue le vote du Parlement européen sur l'AI Act - un cadre européen pionnier pour une IA innovante, avec des garanties claires, avait déclaré Mme von der Leyen l'an dernier. Cela profitera au fantastique réservoir de talents de l’Europe et constituera un modèle pour une IA fiable dans le monde entier », si ce n'est qu'elle a partagé son message sur... X, car le fantastique réservoir de talents n'a pas encore créé de concurrent européen pour le réseau de microblogage de M. Musk, et que, quand bien même l'Europe disposerait-elle de la meilleure réglementation au monde en matière d'IA, elle ne dispose malheureusement d'aucune entreprise de taille à réglementer dans ce domaine. Seule une start-up chinoise, DeepSeek, a ébranlé la domination américaine.
En outre, l'IA est très énergivore. La politique énergétique particulièrement malavisée de l'UE, qui a entraîné une hausse considérable des prix de l'énergie, constitue un handicap supplémentaire pour les acteurs européens de l'IA. C'est de plus d'énergie dont l'Europe a besoin, non de moins. Mais, ce dont nous avons encore plus besoin, c'est d'entrepreneurs qui ont le gène bien ancré - ce qui n'est pas courant en Europe où l'on se méfie de l'esprit d'indépendance -, et ne partent pas lancer leur projet aux Etats-Unis où l'on ne leur met pas de bâtons de toute sorte dans les roues et ils savent trouver du capital-risque privé en abondance. Ça, il n’appartient pas à l'UE d'y pourvoir, fait observer l'auteur de l'article dans Die Zeit : quels ont été les bienfaits économiques réels du plan de relance européen de 2020 « Next Generation EU », interroge-t-il, via lequel l'UE a octroyé des prêts à hauteur de 750 milliards d'euros ?
L'Europe est à la croisée des chemins entre son modèle interventionniste (réglementation, contrôle de l'information, protectionnisme et soutien de la demande) et un retour à ses fondements libéraux (plus de démocratie, plus de marché et de concurrence, liberté de mouvement et de parole, soutien de l'offre et, par cette voie, de l'innovation). Son modèle actuel a clairement failli. A l'introduction de l'euro, les économies des Etats-Unis et de l'Union européenne étaient à même hauteur. En 2023, le PIB par tête était de 82.769 dollars aux Etats-Unis et de 41.422 dollars dans l'UE. La hausse du dollar dont se plaint l'administration Trump est le résultat d'un surcroît considérable de productivité aux Etats-Unis, lequel explique que l'euro a baissé de 30% par rapport au dollar depuis 2008.
Reste à l'Europe à promouvoir la liberté et la responsabilité individuelle, la diversité des idées et le dynamisme du marché. L'Histoire montre que les sociétés les plus prospères sont justement celles qui protègent la liberté plutôt que de la restreindre.
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