La transformation de l'UE en un empire continue de plus belle
Majorité patchwork pour la nouvelle Commission européenne
Oubliez la subsidiarité. Qu'au moment où le nucléaire redevient populaire, du moins nécessaire aux yeux d'une majorité de citoyens, la présidente de la Commission européenne Mme von der Leyen nomme des opposants à cette source d'énergie à des postes clés a de quoi surprendre, estime Pieter Cleppe dans une analyse sur Doorbraak. Mais, en définitive, cela le devrait-il ? Ce n'est pas anodin que, dans les couloirs de la Commission et les milieux diplomatiques, la présidente soit surnommée « l'impératrice Ursula ». L'UE est bien sur la voie de l'empire. (Cf. Le Déclin, La crise de l’Union européenne et la chute de la République romaine, Analogies historiques, David Engels.)
Pendant le premier mandat de Mme von der Leyen à la tête de la Commission, la réglementation européenne a explosé, en particulier dans les domaines de l'environnement et du numérique. Dans son récent rapport sur la compétitivité européenne, l'ancien président de la BCE, Mario Draghi, a mis en garde : « Avec tout le fatras législatif, nous sommes en train de tuer nos entreprises. » Mme von der Leyen n'en a apparemment cure, ni du mécontentement grandissant de l'opinion publique. La répartition des responsabilités au sein de la nouvelle Commission européenne le démontre : elle entend tout simplement poursuivre sur sa lancée (*).
Exit Thierry Breton
La démission abrupte de Thierry Breton a, observe le journaliste de Doorbraak, marqué un moment important dans la consolidation du pouvoir de Mme Von der Leyen. Cette dernière a été accusée par le commissaire sortant d'avoir manigancé avec le président de la République française Emmanuel Macron pour l'écarter, lui qui s'était permis d'émettre des réserves à l'égard de sa gestion. Ce faisant, Mme Von der Leyen s'est assurée d'un renforcement de son propre pouvoir. Politico a qualifié la répartition des compétences au sein de la nouvelle Commission de « prise de pouvoir », avec des fidèles comme le Slovaque Maroš Šefčovič et le Letton Valdis Dombrovskis qui se sont vu attribuer des postes cruciaux avec, notamment, le Green Deal d'une part, l'économie et la productivité d'autre part.
Le plus inquiétant, fait remarquer Pieter Cleppe, reste la façon dont Mme von der Leyen a nommé de fervents partisans de l'actuelle politique climatique européenne à des postes où ils pourront exercer une influence décisive sur la continuation de cette dernière. Une partie des compétences en la matière échoit à Teresa Ribera, une écolo-socialiste espagnole de la première heure qui soutient des politiques climatiques que beaucoup considèrent comme économiquement néfastes. Or, elle sera responsable d'une « transition propre, juste et compétitive ».
Elle sera aussi commissaire à la concurrence. Selon sa lettre de mission disponible sur le site de la Commission, c'est censé répondre à l'appel du rapport Draghi « pour une économie décarbonée et circulaire, conforme à l'objectif primordial du Green Deal conçu comme stratégie de croissance au cœur de notre nouvelle politique industrielle ». Or, le rapport Draghi avait, semble-t-il, affirmé que ces différents objectifs étaient incompatibles. Ça promet !
Atomkraft? Nein, Danke!
L'opposition de Mme von der Leyen à l'énergie nucléaire, la seule source d'énergie qui permette à la fois de soutenir notre niveau de vie et de réduire les émissions de CO2, est tout aussi problématique. Teresa Ribera n'est pas la seule à s'opposer à l'énergie nucléaire. Dan Jørgensen, un autre acteur clé de la politique énergétique de la Commission, est sur la même ligne, selon Cleppe. La politique qu'il a menée comme ministre danois du Climat a été caractérisée par des projets énergétiques coûteux et finalement voués à l'échec.
Le Luxembourgeois Christophe Hansen, qui sera le nouveau commissaire européen à l'agriculture et à l'alimentation, est un autre personnage avec des antécédents « climat ». Ancien rapporteur de la directive européenne sur la déforestation, il est à l'origine d'une mesure qui a suscité d'importantes tensions entre l'Union et plusieurs partenaires commerciaux. Dans un premier temps, ce sont surtout les grands exportateurs d'huile de palme, tels que la Malaisie et l'Indonésie, qui se sont plaints. Ils considéraient que les exigences de l'UE étaient absurdes, car 93 % de ses importations d'huile de palme en provenance de ces pays étaient déjà durables. Le refus de l'UE de reconnaître les normes de déforestation de ses partenaires commerciaux, lesquelles, selon les ONG, ont pourtant permis de réduire efficacement la disparition des forêts, a bloqué les négociations commerciales avec l'Asie du Sud-Est, région en plein essor. (Le Royaume-Uni s'est montré plus pragmatique et s'est contenté de reconnaître les normes locales.)
Mille milliards de mille sabords !
A la liste des personnalités problématiques s'ajoute le Lituanien Andrius Kubilius, qui postule le poste de commissaire à la défense. Il a plaidé en faveur d'une plus grande émission commune de dette européenne afin de lui permettre de dépenser 500 milliards d'euros. Il se serait rendu compte des difficultés puisqu'il a déjà suggéré d'autres sources de financement : le fonds de relance de l'UE et le MES, le « fonds d'urgence » de la zone euro.
Stéphane Séjourné, candidat français au poste de commissaire et proche allié du président français, soutient pleinement la centralisation de l'UE. Il a été député européen jusqu'en janvier et a voté avec enthousiasme non seulement en faveur de nouvelles taxes européennes mais aussi en faveur de la fameuse interdiction des moteurs à combustion interne qui symbolise de plus en plus la politique industrielle suicidaire de l'Europe. Qu'il ait en charge la stratégie industrielle et la prospérité de l'UE serait une ironie de l'histoire, si ce n'en était pas un aspect tragique.
La répartition des pouvoirs est significative de la transformation de l'UE en un empire. Les postes clés ont été attribués à des personnes de confiance de Mme von der Leyen, laquelle a habilement manoeuvré. En théorie, le Parlement européen et les États membres de l'UE pouvaient tout faire réviser. En pratique, c'était peu probable, selon Cleppe, et, pourtant, le vote fut serré. La nouvelle Commission européenne n'a recueilli que 370 votes favorables, soit 54 % des suffrages exprimés et 51 % du nombre total de députés européens (719). C'est la majorité la plus faible de l'histoire pour une nouvelle Commission. Il s'agit d'une majorité patchwork, mais la remise en question des politiques les plus néfastes de l'UE est reportée sine die.
(*) Ces vaniteux nous enfumant et leurs drôles d’idées, L’Europe sous l’emprise de l’idéologie.
Merci pour cet article sur le monstre européen dont les réglementations viennent trop fréquemment s'ajouter aux nationales. Le marasme économique dans lequel est la France ( nous parlons bien d' une crise économique, plus que financière ), causée par la dissolution par le Président de l' Assemblée Nationale en est témoin.
J' aimerais voir l' UE publier le coût moyen de l' énergie électrique par Kwh ET par source : nucléaire, combustible fossile, éolienne, hydraulique,...
J' aimerais aussi connaître l' évolution de son coût par rapport à ses projets ayant amélioré le niveau du citoyen européen. Un exemple de son non efficacité est l' étiquettage des produits alimentaires, pas de standards et infos compliquées autant que confuses.